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Les 3 concerts inoubliables de Days Off 2018

Le Festival Days Off s’est achevé dimanche 8 juillet à la Philharmonie (Paris) après neuf jours époustouflants, beaux comme un sommaire de Magic. Dans cette programmation ambitieuse, nous avons retenu trois moments inoubliables.

1. David Byrne, moderne et visionnaire

La tête, puis les jambes. Pour son premier concert parisien depuis 2009, David Byrne nous est d’abord apparu seul, assis derrière une petite table, tenant à la main un cerveau en plastique en chantant Here, morceau terminal de son récent American Utopia. Avant d’être progressivement rejoint par les membres de son orchestre, grand comme une équipe de foot et vêtu de manière tout aussi uniforme. Des costumes gris faussement neutres qui donnent à l’ensemble, propulsé par une époustouflante scénographie, des allures de secte post-punk venue prêcher les apocalypses du siècle dernier (les fans des Talking Heads ont été copieusement servis, avec notamment plusieurs extraits de Remain in Light et Speaking in Tongues) ou de celui en cours : en guise d’ultime rappel, le groupe, rejoint par l’excellente chanteuse de première partie Laura Mvula, conclut sur une reprise incendiaire du Hell You Talmbout de Janelle Monáe, litanie rageuse (“Say his name, won’t you say his name?”/ “Dit son nom nom, vas-tu dire son nom ?“) des noms des victimes de violences policières ces dernières années aux États-Unis. À l’entrée de la salle, Byrne avait invité des compatriotes militants à venir motiver les Américains expatriés à voter par correspondance aux élections de mi-mandat de novembre. Ceux qui, comme il le chante sur le toujours fascinant Once in a Lifetime, se demandent peut-être comment leur monde en est arrivé là.

Jean-Marie Pottier

Revoir David Byrne : le 5 novembre au Zénith (Paris)

2. Etienne Daho, pape de la pop

Toute la direction artistique de Blitz, son dernier album publié en novembre 2017, épouse Daho et ses quatre musiciens dès le début du show. Bracelet clouté, cuir, lumières à dominante verte, lasers de clubbing. Mais le spectacle proposé par le “pape de la pop” (notre “une” du numéro 207) va très au-delà de la promotion de sa dernière oeuvre discographique. A 60 ans passés (autant dire qu’il ne les fait pas), Daho propose une relecture habitée de plus de 35 ans de carrière au sommet de l’exigence artistique et la reconnaissance populaire. Tous les tubes sont là, dans leur éclatante modernité, dans leur parfaite actualité. Dans la série documentaire que France Inter lui consacre cet été, l’artiste affirme qu’il assume tout, jusqu’au moindre coup de cymbale, de sa production studio depuis Pop Satori (1985), son premier grand album. Par son engagement scénique, son émotion intacte à les jouer, sa communion avec le public qui le bouleverse encore malgré tant de métier, Daho a illustré ce propos avec une maîtrise éclatante, proche de l’état de grâce.

Cédric Rouquette


Revoir Etienne Daho 
: Le 19 juillet au Festival du Cargo à Arles, le 20 juillet au Midi Festival à Hyères, le 22 juillet au Festival Biarritz en été, le 27 juillet aux Escales de Saint-Nazaire, le 1er août au Monte-Carlo Sporting Summer, le 4 août au Ronquières Festival (Belgique) et le 17 août à La Route du Rock à Saint-Malo.

3. Seu Jorge, l’esprit de David Bowie

Le Brésilien Seu Jorge chante David Bowie entouré de l’Orchestre national d’Île-de-France pour la clôture du festival parisien Days Off. Une performance déjà présentée aux Nuits de Fourvière, accompagné de l’Orchestre de l’Opéra de Lyon. Nous sommes au début des années 2000 quand Wes Anderson lui propose de reprendre en portugais le répertoire du chanteur pour les besoins de son prochain film La Vie Aquatique sorti en 2005. Seu Jorge joue un marin chantant tout seul sur son bateau, bonnet rouge à la Cousteau vissé sur le crâne. Des décors du film – qui constituaient une partie de la scénographie de cette tournée hommage entamée en 2017 –, seule une barre de gouvernail subsiste. L’orchestre sublime ses premières versions en guitare-voix. Les chansons de Bowie sont de toute façon taillées pour. La structure des morceaux est respectée, les envolées lyriques aussi, adaptées néanmoins à sa voix de baryton pour un supplément d’âme. De Ziggy Stardust à Starman, en passant par Rebel Rebel, la chanson préférée de Wes, et Five Years, la sienne, Seu Jorge ne commet aucune faute en reprenant les tubes rock entre saudade, samba et carioca. Difficile, pourtant, de se détacher de la voix et l’esprit du chanteur disparu, tant ses chansons sont des tubes. Il lui dédie Life On Mars, ainsi qu’à son père, décédé à trois jours d’intervalle en janvier 2016. Emotion.

Alexandra Dumont

Revoir Seu Jorge : Le 10 juillet au Théâtre de la mer à Sète.