Photo issue de la pochette du "Dernier Album" de Mendelson
© Mendelson

Le futile est essentiel – Le Top 2021 de Grégory Bodenes

Les rédacteurs de "Magic" défendent leurs dix albums de l'année dans un Top 10 très personnel. Mendelson, Iosouncane et Murcof trônent dans le classement de Grégory Bodenes.

  1. MENDELSON – Le dernier album 
  2. IOSOUNCANE – Ira
  3. MURCOF – The Alias Sessions 
  4. AROOJ AFTAB – Vulture Prince 
  5. LA REINE GARÇON – La Reine Garçon 
  6. CONSTANT FOLLOWER – Neither Is Nor Ever Was 
  7. ARAB STRAP – As Days Get Dark 
  8. COLIN CHLOÉ – Où L’Eau Te Mène
  9. GASPAR CLAUS – Tancade 
  10. KAREN PERIS – A Song Is Way Above The Lawn 

Chaque année, de manière sempiternelle pour ne pas dire inaltérable, revient ce rituel des tops et autres palmarès de nos disques chéris tout au long des douze mois écoulés. Certains peuvent trouver cela futile ou ridicule, mais en ces temps aussi lourds que des cieux d’orage, n’y-a-t-il finalement rien de plus essentiel que le futile justement ? En ces temps où les virus imposent leurs lois invisibles, n’a-t-on pas besoin de refuges et d’espaces où l’on peut s’effacer de l’angoisse et de l’anxiété ?

Le futile est devenu par la force des choses un mouvement qui traduit l’élan vital. Les disques d’une année donnent une image de cette période, ils en sont parfois des prémonitions, parfois des papiers d’argent révélateurs. Sur leur surface, viennent se déposer des particules des sentiments collectifs.

2021 aura été une année de contrastes tendue par des forces contraires, une envie d’explorer les ombres et les tréfonds du mal sur un pôle et sur l’autre, une tentation de la douceur et de la paix.

Mendelson et Karen Peris, même combat

Pas surprenant donc de retrouver ici Mendelson et Pascal Bouaziz mais aussi Karen Peris (The Innocence Mission). L’un comme l’autre sont les deux identités d’une seule et même entité, d’un humanisme à fleur de peau, d’une suite de nuances de sensibilité qui font le sel de la rencontre empathique.

Avec Le Dernier Album, Pascal Bouaziz et les siens achèvent l’aventure Mendelson et n’oublient pas de signer un nouveau chef-d’œuvre. Un disque sans complaisance, ni sans la moindre facilité, où Bouaziz parvient à réussir un mariage entre Kozelek et Ferré le temps de ce morceau de bravoure qu’est Algérie.

Chaque année est l’occasion d’une révélation. En 2021, elle nous vient d’au-delà des Alpes. Ira, le nouvel album de Iosonouncane est un véritable ovni, créant en soi un nouveau langage musical et un vocabulaire inédit. Piochant son inspiration dans le chaos, Ira ne nous épargne jamais tout comme le nouvel effort du mexicain Murcof où Fernando Corona déploie des alliages étranges, des unions incongrues entre noise et electro.

De contraste, il est bel et bien question en 2021 avec des choix marqués, le postulat de la douceur et de l’évasion de soi à l’image de Vulture Prince, ce joyau de la pakistanaise Arooj Aftab.

De l’autre côté du globe, La Reine Garçon, le nouveau projet de Fabien Guidollet (Verone/Facteurs Chevaux) explore les mêmes sensibilités entre folk et surréalisme, entre poésie et prose. Avec Neither Is Nor Ever Was, l’Écossais McAll signe un classique et fait entrer son groupe Constant Follower dans le cercle restreint des grands groupes Pop aux côtés de The Apartments ou de Prefab Sprout.

2021, année de constrastes

D’Ecosse, il est beaucoup question en 2021, de retour également. Retour inespéré et ô combien gagnant s’il en est pour Arab Strap qui fait de As Days Get Dark peut-être son meilleur disque à ce jour, Aidan Moffat et Malcolm Middleton n’oubliant pas de se mettre en danger et de sortir de leur zone de confort.

Le Brestois Colin Chloé sort presqu’en catimini son troisième album Où L’Eau Te Mène où il parvient à un délicat équilibre entre ses tentatives éléctriques et ses besoins plus acoustiques.

Cela faisait bien longtemps que l’on attendait un premier véritable album solo du violoncelliste Gaspar Claus, Tancade, son voyage onirique dépasse toutes les espérances et nous transporte vers une plage édenique.

Après Violet, Karen Peris signe son deuxième album solo avec A Song Is Way Above The Lawn qui est à la fois une œuvre absolument personnelle et aussi une prolongation de ce qu’elle compose au sein de The Innocence Mission.

2021 restera comme une année musicale toute en contrastes, puissante et douce, affirmée et suggérée, ce que l’on pourrait qualifier de grand cru.