Pour la survie de la presse indépendante

Pour la survie de la presse musicale indépendante

À l’attention de
Mme Roselyne BACHELOT

Ministre de la Culture
M. Jean-Philippe THIELLAY
Président du Centre National de la Musique

Paris, le 17 décembre 2020

Madame la Ministre,
Monsieur le Président,

Le monde de la musique vit une des crises les plus graves de son histoire. Artistes, musiciens, ingénieurs du son, salles de concerts, labels : tous souffrent des incidences graves de la crise sanitaire qui frappe notre pays depuis mars dernier.

Dans cet écosystème, un secteur fait peu de bruit. Il meurt pourtant doucement, en silence, sans que personne ne lui vienne en aide. Ce secteur, c’est celui de la presse musicale indépendante.

Cette presse « papier » continue de se battre contre vents et marées pour donner de la visibilité et de la notoriété à des artistes, à des labels, à des concerts, à des festivals, leur permettant ainsi d’apparaître dans tous les kiosques à journaux de France. Cette presse musicale participe dès lors pleinement de ce travail culturel de repérage, de défrichage, de décryptage.

Pourtant, cette presse est superbement ignorée par la puissance publique. Nulle aide, nulle subvention ne viennent soutenir un secteur qui, du coup, se meurt lentement, doucement mais sûrement.

Ce n’est pas faute dans notre pays de bénéficier d’un solide dispositif de soutien à la presse écrite.

  • En effet, les aides structurelles vers la presse ont représenté en 2017 un montant total de 85 millions d’euros. Mais ces aides sont exclusivement destinées à la presse dite IPG (presse d’information politique et générale) à travers un dispositif dont les critères ne cessent d’étonner par leur opacité. Surtout, les titres « culturels » de presse musicale ne sont pas concernés par ces aides à la presse alors qu’ils sont pourtant confrontés à la baisse structurelle de la diffusion comme l’ensemble du secteur de la presse.
  • Depuis le début de la crise sanitaire, divers mécanismes de soutien ponctuel ont par ailleurs été mis en place par le Gouvernement (activité partielle, PGE, fonds de solidarité, aide « discothèques » etc…). Mais là encore, ces dispositifs ne prennent pas en compte la forte chute de revenus liés à l’annulation de tous les événements musicaux en 2020. La presse musicale est en effet dépendante de la publicité venue de la filière musique (80% de nos revenus publicitaires) et l’année 2020 constituant une “année blanche” en termes de festivals et de concerts, la chute de nos revenus est dramatique.
  • Le récent projet de loi de finances a instauré un crédit d’impôt de 30% pour tout lecteur qui s’abonne pour la première fois à un journal. Excellente idée. Mais devinez quoi ? Et bien oui : cette disposition ne vise que les … titres IPG.

Pourtant, des titres comme les nôtres assument depuis des années, voire des décennies, un travail de promotion essentiel de la scène française émergente. Certains artistes et certains labels n’ont que cette presse spécialisée pour apparaître et exister.

Nous voudrions donc, Madame la Ministre, vous rencontrer pour savoir comment le Ministère pourrait soutenir nos titres dès 2020 avant qu’il ne soit trop tard.

Nous voudrions également, Monsieur le Président, solliciter le Centre National de la Musique, la presse musicale indépendante faisant selon nous pleinement partie de l’écosystème dont vous êtes désormais responsable. D’ailleurs, le Centre national du Cinéma a instauré en 2017 un dispositif « Livres et revues de cinéma » avec pour objectif d’encourager la cinéphilie par le biais de la lecture. Pourquoi le CNM ne serait-il pas compétent pour soutenir financièrement les magazines musicaux que nous sommes ?

Nous vous saisissons donc officiellement pour que vous puissiez nous recevoir aux fins d’étudier la possibilité pour le Ministère, comme pour le CNM de soutenir en urgence pour 2020, pour 2021 puis selon des critères à définir pour les années suivantes des titres comme les nôtres.

Vous nous connaissez : la passion de la transmission nous anime bien plus que la recherche de profits qui ne seront jamais ici au rendez-vous. Nous ne voulons pas mieux vivre. Nous voulons survivre.

Comptant sur votre soutien,

Pour Magic, Revue Pop Moderne, Luc BROUSSY
Pour Tsugi, Alexis BERNIER
Pour Jazz Magazine, Edouard RENCKER
Pour Trax, Quentin GUERIOT
Pour Reggae Vibes, MyRock & Plugged, Pierre VEILLET