“Pop (moderne) et joyeuse mélancolie”, par Matthieu Chauveau

Pendant le confinement, les journalistes de Magic ont commencé à vous présenter leur cheminement musical au travers d’une playlist de cinquante morceaux, accompagnée d’un texte de leur composition. C’est au tour de Matthieu Chauveau de vous retracer son parcours de journaliste musical, de sa découverte de Michael Jackson à sa préférence pour The Beach Boys plutôt que les Beatles.

Autant que je m’en souvienne, ma vie a toujours été accompagnée de musique. Première image à jamais gravée ? La découverte de Michael Jackson à 9 ans, sur une chaîne portative bon marché dans la chambre du fils de ma nourrice. À moins que ce ne soit George Brassens, écouté en boucle par mes parents depuis toujours (une intégrale CD traînait à la maison), ou encore mon frère – de deux ans mon cadet – chantant à tue-tête en tapant sur tout ce qu’il trouvait (bientôt arriveraient les vrais instruments de musique). Ensuite, je n’ai cessé de me réfugier dans l’écoute de disques… Ou plutôt de cassettes. Dans les années 90, le meilleur allié du mélomane en herbe était la bande magnétique. Sur une cassette de 90 minutes, on pouvait enregistrer deux albums – un par face. Pratique. De quoi faire le plein de Queen, Dire Straits (avant la puberté), de Jimi Hendrix, de punk (pendant la puberté) et de pop moderne (après la puberté).

C’est donc avec l’arrivée de la majorité – et du nouveau millénaire – que la musique que je tiendrai pour majeure prend tout à coup une place essentielle dans ma vie, avec la sortie de Kid A de Radiohead, la redécouverte d’OK Computer du même groupe et de Grace de Jeff Buckley. Nous sommes en 2000/2001, et c’est à cette époque que je lis pour la première fois la presse musicale. Notamment un numéro spécial des Inrockuptibles avec Radiohead en “rédacteur en chef”.

Un an plus tard, je m’abonne à une certaine Revue Pop Moderne… C’est alors une autre manière d’envisager la musique qui s’offre à moi. Finies, les découvertes fortuites liées au prêt de disques par des amis ou de la famille (pratique : Internet se démocratise dans les mêmes années). Place à la lecture de critiques et interviews où chaque référence renvoie à plusieurs autres : Radiohead qui cite Sparklehorse, qui travaille avec le producteur de Mercury Rev, dont la voix haut perchée et fêlée du chanteur rappelle celle de Neil Young et les arrangements orchestraux The Beach Boys (groupe qui ne m’évoquait alors que quelques clichés de plage et de surf, mais qui allait s’imposer tout en haut de mon panthéon personnel).

Tout cela pour dire qu’en 50 titres, je livre ici un aperçu des morceaux qui m’accompagnent depuis le début des années 2000 (qu’il serait honnête de compléter par une playlist jazz, genre que je prends de plus en plus de plaisir à écouter, tard la nuit et sur vinyle de préférence), et qui sont reliés entre eux de manière à la fois totalement subjective et objective. Car derrière la diversité des esthétiques et des époques, ces titres partagent une même attention portée à la mélodie, une tonalité douce-amère, une joyeuse mélancolie : celle qui me fera toujours préférer New Order à Joy Division, R.E.M. à Nirvana et même The Beach Boys aux Beatles… La pop au rock.

(Qobuz / Deezer)