Bertrand Belin

Bertrand Belin : deux chansons horizontales à écouter debout.

Bertrand Belin annonce son nouvel album, Persona (à paraître le 25 janvier) avec non pas une, mais deux chansons, et deux clips. Choses nouvelles, réalisé par Yann Garin (skateur professionnel  et vidéaste « à roulettes ») et Glissé Redressé, réalisé par Nicolas Despis, photographe et réalisateur (Radio Elvis, Etienne Daho…) ont en commun l’horizontalité, celle de la ville, pour le premier, et du défilement des images, pour le second, chacune offrant des gouffres, cosmiques, ou des échappées, verticales, de sens.

Voix posée en avant, articulation incisive ou rentrée, lyrisme suspendu, entrelacs harmoniques voyageurs, légers, légers : tout l’art subtil et aérien de Belin est là de nouveau, mais rendu plus abstrait, minéral, élémentaire, par la sobriété hypnotique des arrangements, le balancier du rythme, le son sec d’une caisse claire, une basse simplement synthétique, les nappes étendues. Là, les paroles toutes d’ellipses sonnent comme autant d’évasions de la matière.

Car la matière est première, dans Choses nouvelles, le béton (que l’on dit bien « concrete » en anglais), le banc ancré dedans, un chantier ou l’acier plombent la déambulation, l’envol d’un souvenir amoureux glissant comme les cordes soyeuses sur un refrain. Dans le clip, Belin déambule en funambule sur différentes scènes de la vie urbaine, tournées à l’iPhone, depuis un skateboard.

Glissé redressé, en contrechamp sur fond blanc, met en tableaux défilants la chute et le rétablissement, le bas et le haut, donc, mais sur la ligne, horizontale, du temps qui passe, et qui revient.  Presque une bande inversée, évoquant Magritte, Lynch, ou Viviane Sassen, pour un retour à soi fascinant.

« Si je devais établir un point commun entre ces deux chansons, explique Bertrand Belin, il serait question de solitude contemporaine et d’urbanité formidable et tapageuse. La grande ville, les grands centres urbains et leur pouvoir de fascination et d’engloutissement. La brèche au bord de laquelle il arrive de séjourner, l’équilibre précaire qui inquiète et mobilise. Le choc des parcours individuels avec le réel et la marche du monde. C’est en tant qu’habitant d’une grande ville mondiale, Paris, que je me trouve naturellement plongé dans cette partition, cacophonique parfois, mais également merveilleuse, du tumulte urbain. J’avais envie avec ces deux vidéos de montrer l’individu aspirant à la liberté et à l’autonomie, pris dans le maillage du temps contemporain.  On y voit Paris, mais cela pourrait être une autre capitale, dans sa diversité remarquable et poétique. Et ses habitants, pleins de rêves, d’illusions et de désillusions. Une image du temps présent, un temps rude et pourtant inspirant. »

2019 sera une grande année pour Bertrand Belin car il publiera également son troisième roman, Grands Carnivores, le 24 janvier chez P.O.L., et il réalise aussi la BO du film Ma vie avec James Dean, de Dominique Choisy (23/01), dans lequel il a un petit rôle. Une tournée dans toute la France passera par l’Olympia le 11 avril.

Texte : Wilfried Paris