Dâabord un groupe de jazz au dĂ©but des annĂ©es 2000, et puis tout bascule. Hyperclean, Momotte, Aquaserge. Une myriade dâautres expĂ©riences. Le musicien tarnais et trentenaire Julien Gasc nâa eu de cesse ces dix derniĂšres annĂ©es de sâĂ©parpiller, de sâacoquiner, de sâĂ©panouir. Le surrĂ©alisme de The Olivia Tremor Control, Broadcast et ses mirages pop, le parrainage de Stereolab, la bossa-nova, des sixties rayonnantes, le goĂ»t de lâalĂ©a dâun Richard Pinhas, lâexcentricitĂ© altiĂšre dâun Bertrand Burgalat⊠Ăclairage sur le travail dâun artiste dont lâouverture dâesprit laisse baba. [Interview Jean-François Le Puil â Photographies Olia Eichenbaum].
N.B. Julien Gasc sera en concert avec Aquaserge le 22 mai Ă Paris (Point ĂphĂ©mĂšre) pour notre prochaine soirĂ©e ‘TombĂ©s pour la France’.
Aussi aigu puisse ĂȘtre son chant sur disque, le timbre de conversation de Julien Gasc se rĂ©vĂšle plus viril dans la vraie vie. En revanche, il a bien le mĂȘme visage pileux que sur le portrait qui orne la pochette de son album solo, Cerf, Biche Et Faon (2013). Une image quâil apprĂ©cie particuliĂšrement pour âsa raideur, son cĂŽtĂ© punkâ. Heureusement pour nous, lorsquâil se confie, son regard sâavĂšre moins farouche et plus pĂ©tillant que sur le fameux clichĂ©, malgrĂ© le rhume qui lâoblige Ă sâenfiler un grog Ă la table du cafĂ© oĂč nous bavardons. Cerf, Biche Et Faon, le disque de la spontanĂ©itĂ© et de la puretĂ© pour un esthĂšte dont la formation musicale est plus que solide et lâoreille carrĂ©ment sensasâ. Ici, une bourrade noise dĂ©cadente (Fuck) oĂč il se met âdans la peau de Kim Gordonâ. LĂ , une lettre Ă©mouvante Ă son grand-pĂšre mourant qui vient de se casser le col du fĂ©mur (Canada). Au dĂ©but, une tentative dâadaptation dâun poĂšme populaire de Marguerite de Valois (Nos Deux Corps Sont En Toi), encouragĂ©e en cela par les amis amĂ©ricains de Lake signĂ©s sur K Records. En passant, une pointe dâhumour salace avec Le Sexe Domine, qui clame tout haut ce que tout le monde sait tout bas. Pour son premier essai sous son nom, Julien Gasc sâest laissĂ© aller Ă un jeu dâenfant Ă©loignĂ© de lâunivers maĂźtrisĂ© que peut cĂŽtoyer le multi-instrumentiste aguerri en studio. âCertains control freaks ont le syndrome du peintre qui repeint toujours sur la mĂȘme toile pendant des annĂ©es et qui nâarrive jamais Ă vernir. Moi, je jetais juste un peu de peinture et esquissais un paysage. Comme un dessin dâenfant. Une fois le jeu terminĂ©, jâaimais le regarder, il me rendait heureux.â Ces mots de Julien sont tirĂ©s dâune conversation dont nous avons ici dispatchĂ© lâessence au travers de dix personnages, comme un portrait de famille, histoire de mettre en avant la personnalitĂ© dâun enthousiaste indĂ©crottable et de mieux cerner sa chaleureuse gĂ©nĂ©alogie.
LA FAMILLE GASC
Julien Gasc : Je suis nĂ© Ă Castres et jâai vĂ©cu pratiquement toute ma vie Ă Brassac, un petit village dans le Tarn. Je ne suis pas issu dâune famille de musiciens. Mon pĂšre avait des disques Ă la maison, mais câest tout. Jâai demandĂ© trĂšs tĂŽt Ă mes parents de mâinscrire Ă des cours de piano, dĂšs lâĂąge de quatre ans et demi. Il nây a pas eu de dĂ©clic particulier, simplement un coup de cĆur. Je voulais faire ça. JâĂ©tais assez prĂ©coce, en tout. Ma formation musicale a ensuite durĂ© jusquâĂ mes dix-neuf ans. Je me suis toujours imaginĂ© devenir musicien⊠ou footballeur ! Jâai dĂ» Ă©crire ma premiĂšre chanson Ă lâĂąge de six ou sept ans, mais jâai vite abandonnĂ© parce que jâavais ma formation Ă suivre et ma vie dâenfant Ă mener. (Sourire.) Je me disais que lâapprentissage allait ĂȘtre encore long, sans mâen rendre bien compte. Je me souviens que vers lâĂąge de six ans, je mâenregistrais avec ma grand-mĂšre sur un magnĂ©tophone. Je parlais comme je te parle en ce moment, improvisant des contes que nous réécoutions ensuite ensemble en rigolant. De son cĂŽtĂ©, elle me lisait des histoires et je pouvais me repasser la cassette quand jâen avais envie.
JULIEN BARBAGALLO
Jâai Ă©tĂ© Ă lâĂ©cole Ă Castres et Ă Albi, et câest au lycĂ©e LapĂ©rouse dâAlbi que jâai rencontrĂ© Julien Barbagallo. Dans Aquaserge, Julien Barbagallo, Benjamin Glibert et moi sommes tous nĂ©s la mĂȘme annĂ©e, 1980. Julien, câest le mec drĂŽle. Proposez-lui nâimporte quelle batterie avec des mesures compliquĂ©es et il rĂ©ussira toujours Ă rendre son travail rigolo et facile. Il arrive Ă rendre la complexitĂ© lĂ©gĂšre. Avec Benjamin et Julien, nous nous sommes mis Ă jouer en trio en janvier 2005. Nous avions un peu de temps devant nous entre deux tournĂ©es dâHyperclean et nous avons dĂ©cidĂ© de rĂ©unir nos armes pour donner le meilleur de nous trois. Ă lâorigine, le premier album dâAquaserge devait dâailleurs ĂȘtre un album conceptuel dâHyperclean. Nous avions prĂ©venu FrĂ©dĂ©ric Jean (ndlr. leader dâHyperclean) que nous allions prendre cinq jours pour enregistrer et mixer un disque dont il Ă©crirait le livret par la suite. Pendant six mois, FrĂ©dĂ©ric a essayĂ© de le faire, mais il nâa pas rĂ©ussi. Nous avons fini par acter que notre trio Ă©tait une entitĂ© Ă part entiĂšre. Nous avons Ă©crit la trame de lâĆuvre nous-mĂȘmes, enregistrĂ© les voix et le premier album dâAquaserge Ă©tait nĂ©. Le successeur Tahiti Coco (2008) a Ă©tĂ© mis au point en quelques jours Ă©galement, fin 2005. Avec Aquaserge, nous essayons de nous amuser. Par exemple, notre troisiĂšme LP, Ce TrĂšs Cher Serge, SpĂ©cial Origines (2010), a Ă©tĂ© conçu autour des sons âchâ et âsâ. Nous voulions jouer avec la notion de dyslexie parce que Benjamin lâĂ©tait un peu, dyslexique. Ce sont des blagues, en fait. Depuis le dĂ©but, Aquaserge est un bac Ă sable oĂč nous tentons des paris, le fruit dâune succession de blagues circonstancielles. Lâun se lance avec telle idĂ©e pour rigoler, lâautre en rajoute dans lâinstant, et ainsi de suite.
ALFRED JARRY
Hyperclean fut une expĂ©rience gĂ©niale qui correspondait Ă ce que jâattendais : la libertĂ©, le fun permanent avec les garçons⊠Pour le premier disque, Hyperclean (2005), FrĂ©dĂ©ric Jean a tout fait seul. Nous Ă©changions mais Fredo tenait lâensemble. CâĂ©tait le pilier, le grand frĂšre qui nous tirait vers le haut et nous filait des plans â il nous surpassait par la taille aussi dâailleurs. En parallĂšle, chaque membre avait ses projets personnels. Moi jâavais montĂ© Momotte. Nous avons notamment jouĂ© avec Katerine Ă lâĂ©poque. Lui et GaĂ«tan Chataignier (ndlr. rĂ©alisateur, ex-Little Rabbits) avaient adorĂ© lâalbum de Momotte, Sexe Contre Nourriture (2006). Ăa leur rappelait Alfred Jarry. Pour eux, câĂ©tait de la pop pataphysique et je me retrouvais bien dans cette comparaison. Sur le plan des textes, Cerf, Biche Et Faon relĂšve plutĂŽt de la poĂ©sie du quotidien. La poĂ©sie de la rĂ©alitĂ© de tous les jours que jâessaie de condenser. Pour la chanson Tu MâAs QuittĂ©, jâai mis cinq jours Ă concentrer en huit vers la fin de mon histoire avec ma petite amie de lâĂ©poque. Câest du vĂ©cu, ce sont mes expĂ©riences. Dans lâindie US, tout le monde Ă©crit ainsi. Des artistes comme Bonnie âPrinceâ Billy ou Laetitia Sadier avec Stereolab le font. Dans ses paroles, Laetitia a parlĂ© de ses problĂšmes avec sa mĂšre, son pĂšre, son gosse ou Tim (ndlr. Gane, membre de Stereolab et ex-fiancĂ© de Laetitia). En France, jâai lâimpression quâon se met plus facilement des voiles. Ou alors on chante en anglais pour cacher la misĂšre de nos vies et des poĂ©sies quotidiennes qui en dĂ©coulent.
LAETITIA SADIER
Câest une grande sĆur. Je lâai rencontrĂ©e en 2005. Jâavais trouvĂ© son numĂ©ro dans le bottin de la Gironde. Je lâavais appelĂ©e pour lui confier avoir composĂ© une chanson de Momotte en pensant Ă elle. Sans mĂȘme me connaĂźtre, elle mâa fait confiance et a acceptĂ© dâenregistrer avec moi Ă Toulouse. Comme elle aimait la production de Momotte et trouvait que son autre groupe Monade Ă©tait trop lent, Laetitia nous a invitĂ©s â Emmanuel Mario de Momotte et moi â Ă Moulis-en-MĂ©doc pour bosser sur lâenregistrement de Monstre Cosmic (2008). On a produit une petite moitiĂ© de ce dernier album de Monade. Le studio Ă©tait fantastique. Je me rappelle dâun vrai clavecin baroque incroyable. Ce moment passĂ© avec le matos de Tim Gane est restĂ© dans mon cĆur. Je ne lâoublierai jamais, comme une visite au musĂ©e. Jâai ensuite tournĂ© avec Stereolab en 2008 puis avec Laetitia par la suite. La premiĂšre fois que je suis allĂ© aux Ătats-Unis, câĂ©tait avec Stereolab. Autant de grandes traversĂ©es qui mâont ouvert.
JEAN BARBERIS
Jean fut le directeur artistique de Flux Factory, une galerie et rĂ©sidence dâartistes new-yorkaise. Je le connais depuis deux dĂ©cennies. Jâavais treize ans lorsque je lâai rencontrĂ©, lui en avait quinze. Jean a Ă©tĂ© une sorte de modĂšle pour moi. Il se dĂ©brouillait toujours. Nous traĂźnions ensemble, faisions les poubelles pour trouver des vinyles, des costards. Quand jâĂ©tais Ă la fac Ă Montpellier, il Ă©tait en colocation dans un immense appartement oĂč se trouvait une collection de plus de trois mille disques que lâon aimait parcourir. Mes connexions avec le milieu de lâart contemporain sont venues de lui. La cinĂ©aste et commissaire Marie Losier, les artistes plasticiens Bruno Persat ou Julien CrĂ©pieux â ce dernier mâa invitĂ© Ă jouer les Vexations de Satie cet Ă©tĂ©. Ces aventures dans la musique et dans dâautres disciplines mâapportent lâexpĂ©rience. Je crois quâil nây a pas de hasards. On me propose, et comme je pense ĂȘtre une personne de cĆur, quelquâun dâaimant, jây vais. Le plus important, câest de se demander dans lâinstant si tu es prĂȘt pour lâexpĂ©rience ou pas, quelle quâelle soit. PrĂȘt pour faire un film documentaire, jouer la comĂ©die, interprĂ©ter du Satie, composer des arrangements de violons, chanter sur scĂšne en duo avec Bertrand Burgalat, etc. Je suis en permanence Ă lâĂ©coute, passionnĂ© de tout. Quand jâai du temps libre, jâessaie de dĂ©couvrir tous les disques, tous les groupes. Je lis, je vais au cinĂ©ma, jâassiste Ă des expos. Je me rends dans des endroits oĂč je ne bosse pas forcĂ©ment, dans les Ă©coles dâaudiovisuel, les Ă©coles de cinĂ©ma ou aux Beaux-Arts â jâai toujours apprĂ©ciĂ© traĂźner aux Beaux-arts. Je nâai jamais Ă©tĂ© diplĂŽmĂ© alors câest vraiment lâĂ©cole des salons, de la rue, des bars, des salles de concerts, des galeries dâexpositions⊠Le monde de lâindĂ©pendance en gĂ©nĂ©ral et de lâart indĂ©pendant en particulier. Je nâai pas eu Ă faire de compromis lĂ -dessus. Je crois ĂȘtre un type honnĂȘte qui a une vision dans un tunnel et jâai toujours Ă©tĂ© amenĂ© Ă bosser sur des projets que jâaime. Quand il mâest arrivĂ© une ou deux fois de travailler avec des personnes viles qui ne pensaient quâĂ lâargent, jâen ai Ă©tĂ© malade. Par ailleurs, grĂące Ă Katerine, jâai pu ĂȘtre confrontĂ© au monde du show-biz lorsque jâai remplacĂ© son guitariste Philppe Eveno au moment de lâalbum Robots AprĂšs Tout (2005). Jâai fait deux tĂ©lĂ©s avec eux, notamment Star Academy en live. CâĂ©tait super drĂŽle, dĂ©contractĂ©. Eux aussi, ce sont des enfants. Ils aiment le bac Ă sable.
EDDY CRAMPES
Eddy Crampes (ndlr. artiste de 2000 Records, le label toulousain qui fait paraĂźtre Cerf, Biche Et Faon) et moi avons adaptĂ© en français le titre Together dâHarry Nilsson, qui devient Ensemble sur mon album. Nous nous sommes poilĂ©s. Câest vraiment de la chanson rĂ©aliste. âLâamour quand il croĂźt est plein de surprises/La tempĂ©rature qui monte et qui monte/Et lĂ on prend feuâ. Eddy me disait quâil nây avait que moi qui pouvais chanter un truc pareil, Ă la Johnny. CĂŽtoyer lâĂ©quipe du label 2000 Records a peut-ĂȘtre participĂ© Ă me dĂ©complexer en vue de mon disque. Eddy rĂšgle aussi ses problĂšmes de couple en musique mĂȘme si nous ne naviguons pas dans les mĂȘmes univers. Lui est plutĂŽt Alain BarriĂšre, avec ce cĂŽtĂ© nostalgique (ndlr. Eddy Crampes reprend Elle Ătait Si Jolie dâAlain BarriĂšre sur son album Le Meilleur paru en 2012). Si je devais te citer une grosse influence pour moi, je dirais Paul Williams et son premier LP Someday Man (1970), produit par Roger Nichols. Sur Cerf, Biche Et Faon, lâidĂ©e premiĂšre Ă©tait de crĂ©er de maniĂšre crue. La premiĂšre musique que jâai composĂ©e est celle de Nos Deux Corps Sont En Toi. Je lâavais dâabord proposĂ©e â avec celle de La Cuarenta â aux garçons dâAquaserge, mais ils mâont dit niet. Ils trouvaient ça trop pop, dans la lignĂ©e de ce que nous avons fait avec April March (ndlr. April March & Aquaserge, 2013). Ils mâont conseillĂ© de garder ces partitions pour moi et je me suis dit que je nâavais quâĂ tout faire seul. Une seule prise, un enregistreur 4-pistes, et des chansons quâon aura envie de réécouter. Mon pote R. Stevie Moore, câest tout Ă fait ça. Il Ă©crit et enregistre une composition par jour avec les idĂ©es qui lui passent par la tĂȘte. Par exemple, lâun de ses titres ressemble Ă ce quâil aimerait entendre de Led Zeppelin. Câest sa rĂ©interprĂ©tation personnelle, son Led Zeppelin Ă lui. Moi câest pareil avec La Boucle : câest ce que jâaurais aimĂ© entendre de Yo La Tengo sur leur dernier album, qui est loin dâĂȘtre mon prĂ©fĂ©rĂ©.
WITOLD GOMBROWICZ
Pour le texte dâInfoutu De, je me suis inspirĂ© dâun court passage du roman Ferdydurke (1937) de Witold Gombrowicz. Deux pages Ă propos dâune famille dâaristocrates polonais sur le dĂ©clin. Ils ne savent plus comment ils vont payer leurs domestiques et deviennent dĂ©pendants dâeux. Infoutu De est le prolongement de ma pensĂ©e aprĂšs cette lecture. Je le vois un peu comme une bande dessinĂ©e ou un poĂšme mis en musique. Des gens de 2000 Records mâont dit que cette composition leur rappelait Bonnie âPrinceâ Billy. Witold Gombrowicz mâa beaucoup marquĂ© quand jâĂ©tais adolescent, il a emmenĂ© la littĂ©rature ailleurs. Pas mal dâauteurs mâont impressionnĂ© quand jâĂ©tais trĂšs jeune. Jules Verne quand je devais avoir neuf ou dix ans, CĂ©line Ă quinze ans, Henry Miller, AnaĂŻs Nin, Baudelaire, Richard Brautigan et son Journal Japonais qui exprime bien cette idĂ©e de poĂ©sie du quotidien⊠Jean Epstein a aussi Ă©tĂ© une grande source dâinspiration. Son pari est celui de la fatigue. Pour lui, plus lâartiste est fatiguĂ©, plus il va produire de bonnes choses en laissant sâĂ©panouir une pensĂ©e dynamique et permanente. Aussi, son analyse de Rimbaud et de la poĂ©sie rĂ©volutionnaire du dĂ©but du siĂšcle (ndlr. La PoĂ©sie DâAujourdâhui : Un Nouvel Ătat DâIntelligence, 1921), quâil met en relation avec la rapiditĂ© croissante du monde moderne dâalors, oĂč tout va dĂ©jĂ plus vite. La poĂ©sie nonsense de Lewis Carroll et dâEdward Lear mâa Ă©galement marquĂ©. Le titre La Cuarenta est influencĂ© par cela, avec peu de textes mais beaucoup dâassociations dâidĂ©es, oĂč les mots et les formes peuvent devenir des personnages. La chanson How Was Your Day sur lâalbum avec April March versait dĂ©jĂ lĂ -dedans â une espĂšce dâAlice Au Pays Des Merveilles oĂč le mec tombe dans un puits de questionnements et de choses.
BRADFORD COX
Lorsque nous avons tournĂ© aux Ătats-Unis avec Stereolab, Bradford Cox de Deerhunter partageait lâaffiche avec son projet Atlas Sound. Les membres de Stereolab avaient la quarantaine alors que Bradford a deux ans de moins que moi, nous Ă©tions donc tous les deux comme cul et chemise. Il est adorable. Câest devenu une diva mais il est chou Ă sa maniĂšre. Nous nous ressemblions pas mal je trouve. Câest un sybarite aussi, il aime les belles choses, la bonne bouffe, les belles lettres, les belles images, la belle musique⊠Câest Ă©galement un trĂšs bon photographe. Et un fan absolu de Broadcast depuis ses quinze ans.
MICHEL CATALO
Michel est un artiste qui vit dans le sud de la France. Je le connais depuis que je suis nĂ©, câest un ami de la famille. Nous discutions un soir et il a Ă©crit ce petit texte qui me dĂ©finit comme un dandy (ndlr. on retrouve ces mots sur la page Soundcloud de Julien Gasc). Je trouve ça chouette ce quâil dit de moi. Dans son esprit, le dandy transforme la rĂ©alitĂ© en quelque chose de moins pathĂ©tique. Il conserve une part de mĂ©lancolie mais aussi un regard rieur, du recul et de lâautodĂ©rision vis-Ă -vis de lâabsurditĂ© de notre condition. Ătre dandy, ça peut aussi vouloir dire ne jamais se rĂ©pĂ©ter, ĂȘtre en perpĂ©tuel renouveau, trouver de nouvelles influences en soi-mĂȘme, revisiter son intĂ©rieur, son musĂ©e intĂ©rieur, se redĂ©couvrir et savoir se mettre en danger. Câest trĂšs important, mĂȘme si la routine peut avoir ses bons cĂŽtĂ©s.
DORIAN PIMPERNEL
Un super groupe, dans la lignĂ©e de Broadcast, Pram, Stereolab⊠Câest ma famille, quoi. On sâadore. Pour leur concert parisien du 21 octobre dernier Ă lâEspace B, je me suis proposĂ© afin de remplacer Benjamin Esdraffo, qui ne pouvait pas jouer. Jâai appris leur rĂ©pertoire pour lâoccasion. Doit-on considĂ©rer cette famille comme Ă©litiste, voire snob ? Non, je ne crois pas⊠Câest plutĂŽt le bateau-lavoir, ou le bateau ivre. Nous nous entraidons. Peut-ĂȘtre que nous sommes Ă©litistes dans le sens oĂč nous sommes extrĂȘmement concentrĂ©s sur ce que nous faisons, chacun dans notre domaine. Des amis Ă moi crĂ©ent des choses trĂšs simples, dâautres des trucs plus compliquĂ©s que lâon pourrait considĂ©rer comme prĂ©tentieux. Mais ça reste beau. Le dĂ©nominateur commun est cet amour de la beautĂ©, et de lâinstant.