The Apartments (apart) bannière
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© Philippe Mazzoni

Peter Milton Walsh raconte le cinquième album de The Apartments, les jours d'avant (la lumière finissante de l'été 1996) et ceux d'après (le silence et les ténèbres).

Plus d’un quart de siècle après sa parution, l’album apart (1997) de la formation australienne The Apartments est réédité – et publié pour la première fois en vinyle. À part : c’est assurément le statut de ce disque dans la discographie de The Apartments. Par ses sonorités d’abord, influencées par le compagnonnage de Peter Milton Walsh, l’âme du groupe, avec le duo anglais Everything but the Girl : l’électronique s’y invite, ainsi qu’une certaine légèreté. La danse pointe parfois, des fragrances jazz aussi – celui, peut-être, du In a Silent Way de Miles Davis (1969). L’identité sonore de apart, sa cohérence esthétique le détachent de la discographie du groupe, l’auréolant de cette lueur noire propre aux œuvres troubles, insaisissables, inépuisables. Et puis, apart est le dernier disque avant la bascule dans le silence et les ténèbres. Ce dernier mot est emprunté à Peter Milton Walsh lui-même : il l’énonce dans cette interview, dans laquelle il revient sur la genèse du cinquième album de The Apartments. apart est paradoxe, clair-obscur. Écrit dans la lumière finissante de l’été 1996, tandis que les jours s’étirent dans le bonheur d’une paternité nouvelle, il préfigure pour l’artiste le pire – la disparition prochaine de son enfant. Les chansons, Peter s’en apercevra plus tard, recelaient cette part d’ombre en elles. Leur lumière était viciée. Mais demeure si belle, tant d’années après.

Quels souvenirs te visitent quand tu repenses à l’écriture des chansons d’apart ?

J'ai commencé à travailler sur les chansons, avec en tête la réalisation d’un album, lors des derniers mois de 1996. Le mois de septembre a commencé par une série de journées jaunes et ensoleillées. La fin de l’été était toute proche. Il n’y avait alors pas d'Internet – du moins pas à la maison – mais de toute façon, je m'étais, avec bonheur, déconnecté du monde. J'avais la maison pour moi seul deux jours par semaine, durant lesquels j'écrivais et arrangeais les chansons. Puis suivaient trois jours où j'y étais avec notre premier enfant, notre fils de neuf mois, Riley. Leonard Cohen avait dit qu'il serait heureux si un seul mot était écrit sur sa tombe : «Père». J'avais l'impression que ce moment était peut-être venu pour moi. Quand j'étais avec Riley, je parvenais quand même à avancer sur les chansons, par petites touches. Au fil de jours rythmés par les siestes, les repas et les promenades dans le parc, toute une matière s’est ainsi constituée, par bribes de mélodies et de paroles. Un vers achevé pouvait apparaître par surprise : “I heard of your withdrawal from the world, there’s a rose that blossoms in the barrel…”1.

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