L’ADORERÉTIENNEDAHOGREATESTSHITS
Etienne Daho
Parlophone

« L’ADORERÉTIENNEDAHOGREATESTSHITS », Daho fait son best-of

Écouter Daho, même et surtout si l’on connaît ou l’on croit connaître déjà tous les morceaux de cette anthologie renversée, c’est retrouver métaphoriquement le goût d’une madeleine de Proust démultiplié non pas à l’infini mais par autant de titres (40 !) figurant sur ce double album reprenant peu ou prou le déroulé (inversé) de la compilation L’Homme qui marche, sortie en 2015. En comparant les deux, on s’est aperçu qu’il y manquait Sortir ce soir, Rendez-vous à Vedra ou encore La Ville en duo avec Daniel Darc, Tous les goûts sont dans la nature avec Jacques Dutronc mais qu’à contrario, il y figurait (selon mon décompte) dix nouveaux titres dont les récents Tirer la nuit sur les étoiles avec Vanessa Paradis, Le Phare, Boyfriend ou encore L’Étincelle. Daho a aussi ajouté la délicieuse Et si je m’en vais avant toi en duo avec Françoise Hardy, ou encore la version live de Sur mon cou, un poème de Jean Genet, enregistré à la Salle de la Cité à Rennes en 1998, à domicile donc.

Écouter, réécouter Daho, c’est un peu comme retourner dans son passé, surtout si, comme moi, étudiant, on a vécu à Rennes, habitant au numéro 1 de ladite fameuse rue de la Soif, quelques années après que le parrain de la pop se fut «envolé» à la capitale. Comme si les chansons de Daho servaient de jalons à nos vies intimes (et elles le font !), mais aussi de marqueurs de l’époque. Après Proust, convoquons donc Prévert, pour dresser un petit inventaire subjectif… Il y a la petite musique du Grand Sommeil, comptine pop un peu étriquée, avec son saxo, sur laquelle on dansait en boîte, bougeant à peine les jambes, en se dandinant discrètement. Il y a Tombé pour la France, avec ses sons de synthés rigolos («Sur un jerk électronique / Se nouent des amours ludiques…»), qui marquait le mitan des années 1980, son versant poppy et joyeux, avec cette fois un solo d’harmonica.

Il y a – plus tard – Bleu comme toi, single pop d’une perfection absolue, son refrain délicieusement cryptique («La nuit porte conseil / Et je sais le mal que l’on nous fait / Le mal que l’on nous fait, et mon humeur est / Down, down, down, down / Mon humeur est down, down, down, down…»), chanson sans doute d’autant plus chère à mon cœur qu’elle est associée à une histoire d’amour… Je pourrais continuer presqu’à l’infini, entre la beauté inégalée de Premier jour, morceau à se passer en boucle pour se rebooster le moral puissance 1000, la grâce d’Ouverture et son texte incroyable («Il n’est pas de hasard / Il est des rendez-vous / Pas de coïncidence / Aller vers son destin / L’amour au creux des mains / La démarche paisible»), chanson que l’on voudrait tous avoir en tête comme bande-son pour accompagner un premier rendez-vous amoureux avec l’élu(e). À écouter, réécouter ses chansons pas si innocentes, toujours affûtées – Les Bords de Seine avec Astrud Gilberto, L’Adorer, Un homme à la mer –, l’on ne peut s’empêcher de penser que, oui, Daho est un magicien, un alchimiste, et qu’il illustre à merveille cette formule légèrement détournée par mes soins : «Un peu de douceur (pop) dans ce monde de brutes».

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