Brothers & Sisters
Steve Mason
Domino Records

Chronique : Steve Mason, grand angle

L'Écossais Steve Mason fait paraître son cinquième album, "Brothers & Sisters", disque ouvert et d'action qui pourrait bien être son plus abouti.

On a un peu oublié les exploits de The Beta Band et par extension ceux de leur ancien leader Steve Mason. Presque dix-neuf ans après la séparation du groupe, il serait peut-être temps de redonner la place qu’il mérite à l’Écossais. Brothers & Sisters, son cinquième disque solo, nous rappelle combien ce gars-là sait trousser des chansons à tiroirs, inventives, au propos social toujours plus appuyé. Et si, toutes proportions gardées, Steve Mason était à sa manière la réponse britannique aux travaux du Toulousain Michel Cloup ? Comme l’ex-Diabologum, Steve Mason nous parle de la force du collectif, de la puissance de l’unité d’une société des citoyens lambda. Mais là où Cloup insuffle de la hargne, pour ne pas dire de la rage à sa musique, Steve Mason choisit la voie de l’efficacité pop.

Jusqu’ici, Mason était de ces artistes clivants avec ses tours de passe-passe et ses effets de manche parfois un peu artificiels. Sur Brothers & Sisters, il sait se recentrer sur l’essentiel : des chansons, des vraies. Pop et fédératrices, sans oublier de nous parler à nous les petits, ceux d’en bas, ceux d’en bas dont Mason n’a pas oublié qu’il fait partie. Mais là où Steve Mason est le plus pertinent c’est dans cette capacité qu’il a d’ouvrir sa musique en mode grand angle et de laisser entrer dans son auberge espagnole tout ce qui peut apporter quelque chose de neuf et d’enthousiaste. Le Britannique n’a pas oublié qu’il fait partie d’un ancien Empire, d’une île en déclin sociologique, politique et économique. Brothers & Sisters raconte cela mais on entend aussi un cosmopolitisme fervent tout au long de ces onze chansons. Ce n’est pas la présence saisissante du chanteur pakistanais Javed Bashir qui viendra contredire cette perception. Sans trop se l’expliquer, on garde en mémoire dans un coin de son oreille les souvenirs de Music of the Spheres (2001), le troisième disque solo du Stone Roses en chef Ian Brown, tout au long de l’écoute de cet album. Sans doute est-ce cette exaltation libertaire qui est commune aux deux albums ?

C’est assurément le disque le plus abouti parmi les œuvres en solo de Steve Mason, c’est aussi le plus ouvert mais également le plus ramassé sur lui-même pour cette capacité à unir les genres. On entend aussi bien des sonorités gospel (oui, gospel !) que des éléments issus de la soul, on croise dans l’arrière-boutique Tom Waits qui fait la gigue avec Curtis Mayfield. Steve Mason ne chante que des verbes d’action, il suit son chemin ; il faut continuer d’avancer, toujours avancer. Ce qui compte, ce n’est pas le résultat mais la seule marche. Il faut lâcher prise avec la réalité pour mieux lui permettre de se révéler à nous. Rien d’autre ne compte.

SORTIE CD, DOUBLE VINYLE ET NUMÉRIQUE LE 03/03/2023

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